Spotlight : Toshio Hosokawa

Publié le 5 mai 2017

La musique de Toshio Hosokawa forme un « pont entre deux mondes », elle esquisse des lignes entre l’Asie et l’Occident, la vie et la mort, les rêves et la réalité, le son et le silence. À l’image de son concerto pour violoncelle et orchestre, Circulating Ocean - qu’il analysera avec ses étudiants de l’académie ManiFeste - son écriture musicale circule entre ses différentes sources d’inspiration et y puise les éléments fondamentaux de sa production.

Symptôme de sa double formation entre Tokyo et Berlin, les grandes traditions japonaises (le théâtre , la musique de cour gagaku, l’art floral de l’ikebana) et occidentales (Bach, Mozart, Beethoven, Schubert) confluent dans ses compositions, qui comprennent des œuvres pour orchestre, des concertos, de la musique de chambre, de la musique pour instruments traditionnels japonais, des musiques de film et enfin des opéras, où se cristallisent les enjeux dramatiques de son écriture. Distant Voices, pièce commandée par le Quatuor Diotima en 2013, sera notamment interprétée par la formation le mercredi 7 juin au Centre Pompidou lors du concert Diotima.

L’intérêt accordé au silence, rattachant sa création à des visions métaphoriques de l’Homme et de la nature, teinte toutefois sa musique d’une dimension méditative et contemplative proche de la spiritualité asiatique. Elle se compose d’agencements symboliques exprimant l’indéfectible relation de l’humain (le soliste) au cosmos (l’orchestre), chère à la philosophie japonaise, où l’harmonie naturelle est primordiale et l’unité entre l’esprit et la matière, essentielle.

« la musique doit pouvoir rendre ce passage éphémère des sons et non pas être une construction destinée à résister au temps ou à le contrer ». Toshio Hosokawa

Le vide et le silence importent autant, sinon plus, que ce qui en émerge, se traduisant dans sa musique par la prévalence du geste préliminaire, des « blancs », et par la valeur de la résonance, du timbre. Les notes jaillissent pour retourner dans l’obscurité : c’est « la beauté du son nouveau-né », éphémère et fragile comme celle d’une fleur éclose. Cette appréhension cyclique et non pas linéaire des choses rejoint à nouveau son enracinement dans une tradition japonaise ancestrale. Ses œuvres sont elles-mêmes souvent composées en vastes cycles, notamment Landscape, dans lequel Hosokawa peint « des paysages – imaginaires – avec des sons, avec des lignes de sons, un peu comme la peinture de paysage ». Le compositeur, presque synesthète, dessine donc des lignes à mi-chemin entre partition et calligraphie, reliant l’œil et l’oreille, l’écoute et la vue - ce qui n’est pas sans rappeler le leitmotiv de ManiFeste-2017, qui associe la musique aux arts visuels. « Music as calligraphy » sera en l’occurrence la thématique de son cours de composition à l’académie, car sa musique lente et épurée, « calligraphiée sur le néant du temps et de l’espace », s’apparente en effet à l’art japonais de l’écriture.

Toshio Hosokawa est reçu dans les plus grands festivals de musique contemporaine (Festival d’Automne à Paris, Biennale de Venise, Musica Viva…), comme compositeur en résidence (Orchestre symphonique de Tokyo de 1998 à 2007), directeur artistique (Suntory Hall International Program for Music Composition de 2012 à 2015), conférencier (cours d’été de Darmstadt depuis 1990) et en juin 2017 comme compositeur invité à ManiFeste. Il apporte et perpétue en Europe une vision japonaise de la perception sonore et de l’interprétation musicale. Électron libre voyageant entre les cultures, il génère parallèlement un terrain plus ouvert à la musique contemporaine au Japon, notamment avec la fondation d’un festival à Akiyoshidai.

Dans cette optique, les dix jeunes compositeurs de son atelier sont invités à écrire une courte esquisse pour orchestre non « classique », en partant à la recherche de nouveaux concepts d’orchestration qu’on imagine aisément influencés par ses maîtres Isang Yun et Toru Takemitsu, dont il analysera les œuvres lors de l’académie (respectivement Reak et November steps). Ces esquisses feront l’objet d’une lecture d’une cinquantaine de minutes chacune par l’Orchestre Philharmonique de Radio France, dirigé par Pierre-André Valade.

À vos agendas

  • Diotima
    mercredi 7 juin, 20h30, au Centre Pompidou
    Toshio Hosokawa, Distant Voices interprété par le Quatuor Diotima

Quelques œuvres de Toshio Hosokawa

  1. Cloudscape de Toshio Hosokawa
  2. Slow motion de Toshio Hosokawa
  3. Silent flowers de Toshio Hosokawa

À découvrir aussi

person

Toshio Hosokawa

Compositeur (né en 1955)

Toshio Hosokawa se forme au piano, au contrepoint et à l’harmonie à Tokyo. En 1976, il s’installe à Berlin où il étudie…